Lausanne forcée de laisser installer les écrans publicitaires lumineux ?

Indéniablement, les villes romandes commencent enfin à travailler à la réduction de la pollution lumineuse, avec de nombreux plans lumières de plus en plus ambitieux publiés ces dernières années, dans une optique d’amélioration de la qualité de vie et une meilleure protection de l’environnement nocturne.

La ville de Lausanne ne fait pas exception, mais est en train de voir ses efforts menacés par une poignée d’entreprises. Après une longue et justifiée opposition à une société privée souhaitant installer des panneaux publicitaires numériques dans le quartier du Flon, le Tribunal fédéral a admis le recours de la société pour cause de vice de procédure, alors que le Tribunal cantonal vaudois avait reconnu l’impact négatif de ces écrans. Basiquement, ces affichages publicitaires sont d’immenses écrans tactiles animés et extrêmement lumineux, générant une immense pollution lumineuse pour les usager·ère·s et les riverain·e·s. Sous couvert de “service” (il est possible d’interagir avec l’écran pour par exemple obtenir l’horaire des transports publics), ces écrans diffusent de la publicité de manière intrusive et sauvage. La ville de Lausanne, qui jugeait ces installations impropres à l’espace public mais n’a pas voulu relancer la procédure après l’échec au Tribunal fédéral, s’est donc vue imposée l’installation d’un de ces écrans, tout en conditionnant d’essai de deux ans. Mais le pied est dans la porte, et sentant la possibilité de faire facilement plier la ville à son tour, la Société générale d’affichage a elle aussi obtenu son écran, devant la gare de Lausanne, là encore pour une période de deux ans. La ville de Lausanne est sur une pente glissante vers une perte de la maîtrise d’une partie de son espace public.

Dark-Sky Switzerland s’inquiète de ce développement, où seules sont gagnantes les sociétés d’affichage, au mépris des habitant·e·s, des autorités communales, et de l’environnement nocturne. Aussi, il nous apparaît essentiel de souligner que le Tribunal fédéral n’a pas émis de jurisprudence contre la capacité des autorités communales à s’opposer à ce genre d’installations, mais a uniquement admis le recours de la société privée à cause de vices de procédure. La commune de Lausanne et toutes autres communes faisant face à une telle demande d’installation conservent donc leur capacité d’opposition. Dark-Sky Switzerland considère nécessaire l’opposition par tous les moyens possibles contre l’imposition progressive de nouvelles sources sauvages de lumières sans valeur sécuritaire ou culturelle dans le paysage urbain. L’association est confiante dans le bien-fondé de ces oppositions en vertu de l’article 11 de la loi sur la protection de l’environnement et il est très probable que le Tribunal fédéral donne raison aux autorités communales s’il devait être consulté à nouveau dans une procédure libre de vices. Aucune commune suisse n’est tenue d’autoriser l’éclairage publicitaire dans l’espace public si elle ne le souhaite pas. Toute commune peut ordonner l’extinction de la lumière publicitaire entre 22 et 6 heures et exiger le respect de valeurs indicatives pour les luminances des zones environnantes correspondantes. Les demandes de permis de construire doivent être traitées en conséquence, ce qui permet de réduire les conflits avec les riverains et les défenseurs de l’environnement.

Un des écrans lausannois, devant la gare

Le Grand Conseil genevois légifère sur la pollution lumineuse d’origine privée

Le Grand Conseil du canton de Genève a voté la semaine passée un texte visant à lutter contre la pollution lumineuse des privés, en les enjoignant à éteindre les lumières extérieures entre 1h et 5h du matin. Si l’ambition initiale du texte est à saluer, celui-ci souffre malheureusement de nombreuses exceptions émanant de la droite du parlement, limitant fortement sa portée : les vitrines de magasins et les zones touristiques ne sont pas concernées. Les protagonistes de ce projet de loi, déçus par cette voilure réduite, ont même fini par combattre activement le vote de ce texte !

La pollution lumineuse d’origine privée est souvent dominante dans les centres urbains, surtout à l’heure où les communes prennent enfin conscience de la pollution générée par leur éclairage public et implémentent des stratégies pour le contenir. Il existe encore peu d’exemples de textes de loi concernant la pollution lumineuse d’origine privée en Suisse, et tout pas dans ce sens est à saluer. Espérons que les porteurs du projet reviendront avec une nouvelle version plus contraignante dans un futur proche et que les partis bourgeois réaliseront que la mesure est sans conséquence économique mesurable sur les commerces concernés.

Il est intéressant de rappeler que la nouvelle aide à l’exécution de l’Office fédéral de l’environnement rappelle que tous les éclairages qui ne sont pas nécessaires à la sécurité doivent être éteints ou réduits pendant la période de repos de 22h-6h. Les fameuses enseignes publicitaires de la rade de Genève, qui font encore (étrangement) sa fierté, se trouvent déjà en délicatesse avec la loi sur la protection de l’environnement et ne devraient plus être autorisés tel-quel à la construction, si les autorités d’exécution font leur travail correctement. Ce qui n’était pas encore le cas à Genève il y a encore quelques mois.

Le canton du Jura veut éteindre les commerces à 22h

Le canton du Jura, qui fait preuve d’une volonté de limiter la pollution lumineuse sur son territoire depuis quelques années, a envoyé une lettre à plus de 200 commerces pour les inciter à éteindre leur éclairage extérieur dès 22h de manière volontaire, avant que l’Etat ne devienne plus contraignant en s’appuyant sur la législation fédérale en vigueur.

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Essertines-sur-Rolle va retrouver la nuit étoilée

Les bonnes nouvelles se succèdent dans le canton de Vaud. Après avoir participé au projet Perséides l’année passée, la commune d’Essertines-sur-Rolle, 650 habitant·es environ, va prochainement entériner l’extinction de son éclairage public entre 23h00 et 5h en semaine et 23h30 et 5h en fin de semaine.

Un mouvement de fond est en marche dans les communes de l’ouest vaudois pour l’extinction de l’éclairage public au coeur de la nuit. Les communes de Nyon, Mex, Givrins, Le Vaud et Genolier, pour ne citer qu’elles, se sont récemment engagée sur cette stratégie durable et raisonnable de gestion de l’éclairage public.

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Dompierre fait le pas de l’extinction

Une commune romande de plus pourra bientôt profiter d’une nuit noire et étoilée. Dompierre, dans le canton de Vaud, a fait le choix d’éteindre son éclairage public de 23 à 5h, avec à la clé un environnement nocturne préservé et une économie de deux tiers sur la facture d’électricité liée à l’éclairage. Cette démarche, qui a été initiée par la Nuit Est Belle de 2019, a débuté par un essai localisé suivi d’une consultation de la population, puis finalement pérennisé par le conseil général de la commune. Un exemple qui, espérons-le, incitera les communes voisines à franchir le pas de l’extinction nocturne de l’éclairage public !

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Nyon présente son plan Lumière

La commune de Nyon a récemment présenté son plan lumière, avec lequel elle entend repenser l’entier de son éclairage public en laissant une place belle à la réduction de l’intensité lumineuse, à l’ajustement de la couleur des sources pour minimiser son impact environnemental, et même à une extinction nocturne en certains lieux. La commune procède déjà à une réduction de l’intensité de son éclairage entre minuit et 5 heures. Elle entend maintenant avancer cette horaire de réduction à 22h. Dans certains quartiers résidentiels ou industriel, l’éclairage sera simplement éteint entre 22 heures et 5 heures. Il est même question de supprimer purement et simplement certains lampadaires jugés inutiles.

Par ces mesures, la commune de Nyon affirme sa position forte dans la lutte contre la pollution lumineuse dans l’arc lémanique. Contrairement au plan lumière d’autres villes comme Lausanne, celui de Nyon met un accent fort sur la lutte contre la pollution lumineuse et évite largement le piège de n’être qu’un outil marketing menant au final à encore plus de lumière nuisible dans l’environnement.

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